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Ultreia ! En avant !

La voix de Compostelle a appelé – du 25 mai au 5 juin – 24 chrétiens de Dordogne et un peu d’ailleurs sur le chemin de St Jacques, accompagnés par le Père Bruno de Béru, prêtre à Montpon, et Marie-Agnès Delgorgue, ( Direction Diocésaine des Pélerinages de Périgueux).

Que de doutes et d’espoirs au départ tandis que Chantal nous emmenait en car jusqu’au pied des Pyrénées, début de notre route! Serions-nous à la hauteur physiquement, spirituellement ? Huit jours consécutifs de marche, vingt kilomètres par jour, nous nous sommes élevés de toute la force de nos pauvres mollets et de nos pieds brûlants jusqu’aux pèlerins en tôle de la Sierra del Perdon, jusque sur les hauteurs de San Juan de Ortega, ou dans la montée de O Cebreiro.

Mais que de joie à l’arrivée, au milieu des genêts éclatant de blancheur ou d’or, avec le psaume de la Création qui monte au bord des lèvres !

Nous nous sommes unis dans la prière, profondément. Chaque matin, nous marchions la première heure en silence et chacun appréciait ce temps de recueillement personnel. Au cours de la marche, nous reprenions souffle spirituellement dans les églises. A Rabanal, chez les moines bénédictins, à O Cebreiro où fut célébrée une messe fervente …

Le troisième jour, j’ai découvert le plateau de la Meseta. D’abord des collines douces et verdoyantes entre lesquelles serpente sans fin le chemin, des champs sauvages rouges de coquelicots, la chaude lumière de midi sur les blés illuminés de bleuets et enfin la pause délicieuse près d’un lavoir où chante une eau fraîche, au milieu d’arbres qu’on n’espérait plus.

Puis, le lendemain, la Meseta nous a repris, plus sauvage, plus désolée, inhospitalière. Et j’ai aimé cette rudesse du chemin, cette marche au désert, sur l’ancienne voie romaine, rectiligne, sans ombre, hormis celle de quelques arbres rabougris qui ne parviennent pas à grandir, plantés tous les dix mètres. Je compte comme un robot, quinze pas, dix mètres, un arbre, pas d’ombre, quinze pas, dix mètres …

Je marche seule, interminablement … rien ne retient le regard, tout est vide, nu, silencieux; je ne peux qu’être avec moi-même et j’y trouve une grande sérénité.

Une marche au désert, la Meseta, une marche vers l’apaisement.

Enfin dans la matinée du mardi 2 juin, du haut du Mont Gozo, nous descendîmes vers Santiago de Compostela, St Jacques de Compostelle ! Le cœur étreint d’une vive émotion. Ce fut le début de deux jours de partage, de joie et de prière intense, avec quelques heures de détente et de recueillement au Cap Finistère. La dernière messe fut un moment de forte communion, concélébrée dans la cathédrale de St Jacques avec le Père de Béru lisant l’Évangile en espagnol avant l’envol de nos prières dans l’encens du « botafumeiro » s’élançant jusqu’aux voûtes du transept.

Nous repartons heureux, travaillés par le chemin, en route vers d’autres voies, unis par le Christ, avec au cœur le chant de pèlerinage « Gaudeamus hodie ! ». Réjouissons-nous aujourd’hui !

Quand l’amitié estompe le doute

Dans un élan de fraternité

On peut alors reprendre la route

Et s’élever en toute liberté.

Marie-Jo Riglet